vendredi 18 juin 2010

Margret Kreidl; Adilia Lopes; Nanni Balestrini

Al dente 

Les amateurs d’éditions bilingues vont apprécier, dans ces trois livres édités chez Al Dante, ce face-à-face de la parole, ces trahisons aussi. Ces langues en miroir : celle de l’Autrichienne Margret Kreidl, qui rend une visite iconoclaste aux clichés romantiques de l’opérette viennoise ; celle de la Portugaise Adilia Lopez, « poétesse pop », enfantine et tragique ; celle de l’Italien Nanni Balestrini, incantatoire et forte.

Derrière, un insoutenable désir d’abolir la fragilité du moment quotidien, de le nommer, d’emprisonner le son dans la matérialité coriace de la lettre. Ce qui donne, chez Kreidl, un univers de farce grotesque où le porno tue la minauderie poétique, chez Adilia Lopez, une naïve approche des mots et des choses qui entoure le réel d’un absurde irisé et le tire vers le conte. Les deux liées par ce ton ubuesque que prend la relation homme-femme. Quant à Nanni Balestrini, l’appel au mythe d’Electre est une manière de « capter le reflet », de garder « l’œil dilaté » entre présent et passé, de guetter et défier l’obscurité et la mort. Ces quelques lignes ne remplaceront jamais votre œil curieux de les lire, tous les trois. Et le désir de goûter la chair d’une écriture al dente.
(Publiée dans Regards)

Margret Kreidl, Le Bonheur sur la colline (13 ), Adilia Lopes, Au pain et à l’eau de cologne (14 ), Nanni Balestrini, Electre (13 ), les trois aux éditions Al Dante, Les Comptoirs de la Nouvelle B.S.






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